• À propos de Clovis.

    Chlodweg ! Ce nom germanique nous livre son origine. Il signifie en vieil haut allemand « célèbre par ses combats ». Latinisé en Chlodovechus, Chlodweg donna ensuite Hlodovicus, Lodoys, Louis.

     

    Dans la mémoire collective française Clovis Ier, fondateur de la dynastie mérovingienne, est le premier roi « de France ». Et, aussi, le premier roi catholique, converti entre 496 et 499.

    Bien sûr il y avait des chrétiens catholiques dans la Gaule bien avant lui. Cette religion s’était petit à petit implantée dans les villes, essentiellement parmi les élites gallo-romaines. Clovis fut le premier roi "barbare" à embrasser le catholicisme romain. Les autres souverains de l’époque, qu’ils soient Burgondes, Ostrogoths, Wisigoths ou Vandales étaient ariens, l'arianisme étant une doctrine chrétienne. C’est pourquoi les élites romaines christianisées soutinrent Clovis dans sa conquête de la Gaule. Mais, qui était vraiment Clovis ?

    C’était, à l'origine, un roitelet païen régnant sur une tribu germanique, les Francs Saliens installés au sud de l’actuelle Belgique, aussi pauvre en biens qu’en hommes. Il était le fils du roi franc Childéric et de Basine, une princesse thuringienne. Il succéda à son père en 481 comme roi et comme administrateur (gouverneur) de la province romaine de Belgique seconde. Les mariages de Clovis, ses relations avec sainte Geneviève, les évêques Remi de Reims ou Avit de Vienne, ainsi que les guerres qu’il mena contre Syagrius (Roi des romains de Gaule), puis contre les Alamans, les Thuringiens ou les Burgondes sont amplement décrits dans les dictionnaires, articles d’Histoire, ainsi que nombre de livres. Tout comme sa victoire sur les Wisigoths en 507. Mais il est bon de rappeler comment il élimina vers la fin de son règne – il mourut le 27 novembre 511 – les autres « rois » francs. Il a littéralement massacré sa parentèle, avec des méthodes surprenantes, et un certain cynisme. Tout d’abord, prétextant que Sigebert, roi des Francs rhénans, était vieux et boiteux, il fit suggérer à son fils Childéric que, « s’il mourait, son royaume te reviendrait de droit ». Le fils profita d’un voyage de son père hors de Cologne pour le faire égorger par ses sbires. Tout joyeux, ce dernier fit savoir à Clovis qu’il avait tué son père et qu’il lui offrait une part de ses trésors. Les ambassadeurs de Clovis lui firent ouvrir un coffre rempli de sous d’or et l’un d’eux lui fracassa la cervelle de sa hache. Puis Clovis réunit tout le peuple et prétendit n’être pour rien dans ces meurtres, « car je ne peux répandre le sang de mes parents ». Il leur proposa alors de l’élire comme roi, ce qui fut fait. Son premier fils, Thierry, lui succéda après sa mort comme Roi d'Austrasie - Reims, Metz, Cologne (Köln) - la première branche austrasienne mérovingienne.

    Puis il s’en prit à Chararic, un autre roi mérovingien, qui avait refusé de l’aider contre Syagrius en 486. Il parvint à s’emparer par ruse de Chararic et de son fils qu’il fit occire à leur tour. Et de quatre ! Ce fut ensuite le tour du roi Ragnacaire de Cambrai et de son frère Riquier. Clovis les tua tous deux de sa hache. Et de six ! Rignomer, un autre frère de Ragnacaire, fut tué dans la cité du Mans par ordre de Clovis. Tout ceci est raconté par Grégoire de Tours. On hésite, face à un tel comportement, entre le cynisme et la sauvagerie. Le roi des Francs saliens a supprimé tous les descendants des rois francs institués au IVe siècle. De plus, Clovis continue à rechercher des parents, bien qu’il en ait tué au moins une douzaine. Le jugement de Grégoire de Tours est étonnamment laudatif : « Ainsi, Dieu prosternait chaque jour ses ennemis sous sa main et agrandissait son royaume parce qu’il marchait d’un cœur droit devant lui et faisait ce qui plaisait aux yeux de Dieu.» Et pourquoi Dieu aurait-il approuvé ces massacres à la hache ?

    Le roi des Ostrogoths Théodoric « le Grand », d’ailleurs marié avec Audoflède, une sœur de Clovis, contraste par son humanisme et sa politique favorable à la culture romaine dans son royaume d'Italie. Ce roi, le plus illustre des princes ostrogoths, intervint pour sauver les Alamans vaincus par Clovis. Il sauva aussi le royaume wisigoth en installant le jeune Amalaric et Theudis en Espagne. Il empêcha également les Francs et leurs alliés Burgondes d’occuper Arles et la Provence.

    Le plus ancien document sur Clovis que nous possédons est une lettre que l’évêque de Reims, Remi, lui a adressée en 481/482. Il y salue le roi qui vient de prendre l’administration de la Seconde Belgique et l’exhorte à bien gouverner. Dans cette lettre le «  roi Clovis » est désigné Hlodoveo regi.

     

     


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  • À propos de la vicomté de Limoges.

    Je vais d’abord évoquer, à grands traits, une histoire de Limoges et du Limousin.

    - Le Limousin primitif dont l’étendue est approximativement celle du diocèse de Limoges avant la création de l’évêché de Tulle en 1317.

    - Le Limousin féodal, autour du comté de Limoges, caractérisé par son manque d’unité politique, malgré la suzeraineté du duc d’Aquitaine, et dont le territoire s’est considérablement amenuisé avec la constitution de la Marche.
    - Le Limousin royal enfin qu’on divise traditionnellement en deux régions géographiques : le Haut-Limousin (capitale Limoges) et le Bas-Limousin (Brive, Tulle).

    - Pour finir, la vicomté de Limoges, donc le Limousin, fut rattachée officiellement à la Couronne de France en 1607. Mais on peut considérer que la région faisait partie du royaume dès 1589 car le dernier vicomte titulaire fut Henri de Navarre, avant son accession au trône sous le nom d’Henri IV.

     

    Limoges était déjà un important bourg celtique, chef-lieu du peuple des Lémovices, avant de recevoir sous l’Empire romain le nom d’Augustoritum. Elle reçoit son premier évangélisateur et évêque dès le IIIe siècle en la personne de saint Martial (mort vers 250). Martial fut, selon Grégoire de Tours, un des sept missionnaires envoyés de Rome pour évangéliser la Gaule.

    La prospérité de Limoges ne s’est pas démentie dans les temps mérovingiens et carolingiens, malgré les guerres et l’insécurité générale dans la Gaule aquitaine. Deux fois pillée par les Normands, la ville est relevée de ses ruines et fortifiée. Autour de la cathédrale se développe la cité, cependant qu’autour du tombeau du patron des Limousins naît le faubourg de l’abbaye Saint-Martial. Les deux agglomérations finissent par constituer un ensemble solidement retranché dont le cœur est le Château. C’est dans ce « château » qu’au Moyen Âge résident les derniers comtes puis les vicomtes lorsqu’ils sont dans la ville. En 766 ou 767 Pépin le Bref fait construire un palais à Bourges. Son fils, le futur Charlemagne, mène les Francs jusque sur la Garonne. Il dévaste l’Aquitaine jusqu’à Agen, le Périgord et l’Angoumois. Il obtient la soumission de l’oncle de Waïfre, Remistan. Il remet au monastère Saint-Martial de Limoges la bannière dorée enlevée au duc aquitain Waïfre.

    Nous connaissons peu la liste des comtes de Limoges. Vers 737-741 les sources citent un comte de Limoges nommé Lantharius.  En 778, Charlemagne nomme un nouveau comte, du nom de Hrodgar (Roger), qui nous est connu par l’Astronome. On tient pour sûr aussi l’existence d’un comte Raymond, mort en 864,  vers le milieu du IXe siècle.

    Le 13 octobre 832 Louis le Pieux, qui réside alors dans son palais de Jucundiacum (aujourd’hui commune de Le Palais-sur-Vienne), assiste à la dédicace de l’église abbatiale de Saint-Martial de Limoges. Charles le Chauve y est présenté aux grands d’Aquitaine comme leur roi.

    Charles le Chauve crut habile de rétablir un royaume d’Aquitaine en faisant sacrer à Limoges, en 855, son fils Charles l’Enfant alors âgé de huit ans, mais celui-ci mourut le 29 septembre 866.

    A la charnière des IXe et Xe siècles, le comte de Limoges de l’époque est aussi comte d’Auvergne, et aussi à la recherche de soutiens influents pour légitimer son titre de duc d’Aquitaine. Hildebert, un vassal de Charles le Chauve, est confortablement implanté aux portes de Limoges. En échange d’une charge publique de vicomte, ce vassus dominicus accepta d’entrer au service du comte, duc d’Aquitaine. Hildebert est à l’origine du lignage vicomtal. Hildebert est mentionné pour la première fois en 876 dans une donation faite en sa faveur par le roi Charles le Chauve (décédé le 6 octobre 877). On le trouve ensuite, aux côtés de son épouse Adaltrude, dans un acte de 883. Leur fils Hildegaire est le premier vicomte souverain de Limoges (v. 907 – 945) formellement attesté. Après 927 le titre de duc d’Aquitaine échoit à Ebles II Mancer, comte de Poitiers. Les vicomtes de limoges, vassaux du duc d’Aquitaine, font hommage au comte de Poitiers. Le « Château » de Limoges est le siège de leur pouvoir en tant que représentants officiels d’une charge publique. Mais leurs biens patrimoniaux s’étendent sur un vaste territoire au sud de Limoges. Au XIIIe siècle les châtellenies vicomtales vont d’Aixe à Auberoche (du nord au sud) et de Bourzac à Masseret et Salon (d’ouest en est). L’évêché de Limoges est occupé sans discontinuité de 969 à 1022 par trois membres de cette famille. Très tôt des liens se créent avec la famille de Ségur. Le vicomte Gui I, mort en 1025, épouse en effet Emma de Ségur. Le titre vicomtal reste dans la famille par succession directe jusqu’à Humberge (décédée en 1162/1163), mariée à Archambaud IV vicomte de Comborn, au XIIe siècle. Leurs descendants donnent la « deuxième » maison vicomtale de Limoges et la suite des vicomtes de Comborn. La dernière héritière de Limoges, Marie (morte en 1290), par son mariage le 22 juillet 1275, avec Arthur de Bretagne, fera porter la vicomté de Limoges dans le domaine des ducs de Bretagne.  La vicomté passera ensuite de cette maison de Dreux-Bretagne à celle de Blois-Châtillon, jusqu’à Françoise de Châtillon mariée à Alain d’Albret.
    Le dernier vicomte de Limoges sera le roi Henri IV qui réunit la vicomté au domaine royal.

    L’entrée du vicomte dans la vassalité des comtes de Poitiers au début du Xe siècle doit être considérée comme le véritable événement fondateur de la seigneurie vicomtale, qui resta dans la mouvance des ducs d’Aquitaine pratiquement jusqu’à Richard Cœur de Lion.

    Mais revenons à Hildebert. Le roi Charles le Chauve lui avait donné en 876 l’alleu de Cavaliacus, situé dans la vicairie de Limoges. Quels étaient les autres biens possédés par Hildebert et son fils Hildegaire avant que ce dernier ne reçoive la fonction publique de vicomte de Limoges ? On ne le sait pas trop. Ce qui est certain c’est que les successeurs d’Hildegaire agrandirent considérablement leurs domaines dans les siècles suivants. En effet la vicomté de Limoges, au XIIIe siècle, avait la main sur les châtellenies d’Aixe, Châlus, Nontron, Courbefy, Saint-Yrieix,  Excideuil, Ans, Auberoche, Ayen, Ségur, Masseret, Château-Chervix, La Roche-l’Abeille. Sans compter les châteaux vicomtaux secondaires, Châlucet, Pierre Buffière, Salon, Piégut, Le Bourdeix, Mareuil, Grésignac, Bourzac, Bruzac, Yssandon. Des établissements religieux importants, comme Tourtoirac, fondation vicomtale, mais aussi Aureil, Solignac, Saint-Yrieix, Le Chalard,  ou Dalon étaint situés dans la vicomté.

    Géraud, le fils d’Hildegaire, marié à Rothilde, eut de nombreux enfants :

    -         Gui I, vicomte de Limoges, marié à Emma de Ségur, mort en 1025.

    -         Hildegaire, évêque de Limoges de 969 à 990.

    -         Hilduin, évêque de Limoges de 990 à 1014.

    -         Geoffroy, abbé de Saint-Martial de Limoges.

    -         Aimeri Ostofranc, cité en 1018, fondateur de la maison des vicomtes de Rochechouart.  

    -         Géraud d’Argenton, souche des vicomtes de Brosse.

    -         Aumode qui épousa d’abord Audebert comte de la Marche puis le duc d’Aquitaine Guillaume V.

    -         Tiselga et Aldiardis la Chauve, autres filles attestées.

    Parmi les enfants de Gui I et Emma il faut citer Adémar I vicomte de Limoges et Géraud, évêque de Limoges de 1014 à 1022. Ainsi que Foucher, tige de seigneurs de Jonzac.

    En 1017 les moines de Saint-Martial de Limoges commencent la construction d’une nouvelle église abbatiale.
    En 1062, le vicomte Adémar
    II , avec l’accord de l’évêque de Limoges Itier, de son épouse Humberge et de ses fils, donne à l’abbaye de Cluny et à son abbé Hugues [de Semur] l’abbaye de Saint-Martial de Limoges et renonce à tous les droits qu’il pouvait y prétendre, sauf une coutume de deux cents sous à payer le jour de la Saint-Yrieix, une bête de somme avec son servant en cas de guerre et le droit de gîte dû au comte de Poitiers lorsqu’il se rend à Limoges.

     

    La puissance des vicomtes est alors bien assise. Ils sont dans le groupe des « grands d’Aquitaine » avec les comtes d’Angoulême, de Périgord, de la Marche, d’Auvergne.

    Dans la descendance moderne de la première maison vicomtale de Limoges on peut citer les vicomtes de Brosse dont une branche cadette, dans la seconde moitié du XIIIe siècle, acquirent par mariage les seigneuries de Boussac, Sainte-Sévère et Huriel. La vicomté de Brosse passa aux Chauvigny vers 1313.
    Jean Ier de Brosse, un descendant de Géraud, vicomte de Brosse en 1136, devint Maréchal de France en 1427. Il est aussi appelé Maréchal de Boussac. Sa nomination au maréchalat est postérieure au 31 août 1427, date de l'assassinat du maréchal de Sévérac. Sa postérité s’est éteinte en 1564 avec Jean IV, premier duc d’Etampes.

    La famille de Rochechouart, descendant de cette première maison vicomtale, est aujourd’hui la plus ancienne Maison noble de France actuellement représentée après la race royale capétienne. Cette maison subsiste en deux branches : la branche aînée « marquis » de Rochechouart, et la branche cadette de Rochechouart-Mortemart « ducs de Mortemart » et « princes de Tonnay-Charente ».

    La deuxième maison vicomtale de Limoges [de Comborn] étendit sa puissance au XIIIe siècle par ses alliances – avec les maisons de Turenne, La  Marche,  Cornouailles, Auvergne, Périgord, Ventadour, Gourdon, Lusignan, Bourgogne – et ses échanges ou conquêtes de terres.
    La vicomtesse Marguerite de Bourgogne, veuve du dernier vicomte, Gui VI (décédé entre le 13 et le 16 août 1263), se vit confier la tutelle de sa fille unique Marie de Limoges ainsi que l’administration de la vicomté, qu’elle prit en charge jusqu’au mariage de sa fille avec le jeune Arthur de Bretagne le 22 juillet 1275.

    De son mariage avec Arthur, Marie eut trois enfants : Jean (futur Jean III duc de Bretagne), Gui, qui tint la vicomté de Limoges pendant trois ans (de 1314 à 1317) ; et Pierre, mort prématurément en 1312. Jean III de Bretagne, duc en 1312, tint le titre de vicomte de Limoges de 1300 à 1314, puis de 1317 à 1341.

    Je reviens sur le « règne » d’Adémar V, vicomte de Limoges de 1148 à 1199. Il était le fils unique d’Adémar IV et de Marguerite de Turenne. En raison de son jeune âge, Adémar V fut placé en 1148 sous la tutelle de l’évêque de Limoges Géraud, et de ses oncles Bernard, doyen de Saint-Yrieix, et Archambaud V, vicomte de Comborn. En 1156, le vicomte et sa terre furent confiés par le roi-duc Henri Plantagenêt à deux administrateurs normands. En 1159, ce roi Henri II remit au vicomte sa terre et lui offrit la main de l’une de ses cousines, Sarra de Cornouailles.

    Mais en avril 1198 Philippe Auguste s’engage à aider le vicomte Adémar, qui lui donne sa fidélité et abandonne le roi d’Angleterre Richard Ier Cœur de Lion. Ce revirement d’alliance, peut-être surprenant, est la cause, indirectement bien sûr, de la mort du roi Richard le 6 avril 1199. Richard mourut en effet de sa blessure reçue au siège de Châlus en voulant amener le vicomte Adémar V, qui s’était tourné vers Philippe Auguste,  à résipiscence. 

    Adémar V mourut cette même année 1199, à une date postérieure au 25 juin, et on ne connaît pas le motif de son décès.    

     

    C’est bien court je l’avoue mais j’espère avoir donné ainsi l’envie d’en savoir plus à ceux que le sujet intéresse.

     

     


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